LES CONSÉQUENCES POLITIQUES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Même si le Mondial 2022 était déplacé dans un autre pays, les États du Golfe ne vont pas changer un système lucratif à cause d’informations négatives diffusées en Occident sur CNN. Le Golfe est corrompu et affiche un long et peu glorieux record d’exploitation de la main-d’œuvre étrangère. Le fait que cette main d’œuvre est aussi musulmane limite la visibilité de cette réalité et l’indignation morale qui en découle, mais elle est bien connue. Parmi les travailleurs exploités, on compte aussi des Nord-Coréens, des Philippins et des Africains. Il y aurait donc un bref coup de projecteur médiatique négatif en Occident mais rien qui puisse pousser le pays à changer. Les événements sportifs et culturels internationaux servent ces pays à diffuser une image prestigieuse de leur nation. Ils existent pour créer un semblant de modernisation et pour attirer l’attention positive mais ils ne sont pas déterminants d’un point de vue économique. Si l’État doit se passer de ces événements, cela ne lui coûtera pas assez pour que cela pousse à un vrai changement de la politique en marche.
Joshua Mahony
Analyste des marchés, IG Market
Les relations entre les dirigeants, la famille royale qatarie et leurs homologues britanniques seraient probablement tendues, étant donné que l’enquête pour corruption ouverte par la Fifa a été déclenchée, en partie, par l'enquête d’un journal britannique.
John Phelan
Économiste, Centre of the American Experiment
Les conséquences seraient minimes, je pense. Bien que cela puisse ajouter du ressentiment vis-à-vis de l’Occident dans les pays du Moyen-Orient, ce serait peu en comparaison à d’autres provocations actuelles et passées.
LES CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Les événements culturels dans le Golfe comme les courses automobiles ou le golf servent à conférer un certain prestige à ces pays, mais ils ont très peu d’impact sur l’économie régionale.
Joshua Mahony
Analyste des marchés, IG Market
Cela donnerait un coup de pouce au nouveau pays hôte, dans les secteurs du tourisme, des ventes au détail, de l’hôtellerie et il y aurait une augmentation significative des ventes d’alcool. Les grandes enseignes seraient les principales gagnantes étant donné l’augmentation de la fréquentation mais les hôtels, bars et restaurants en profiteraient aussi.
John Phelan
Économiste, Centre of the American Experiment
Je pense qu’il y aurait peu d’effets. La Coupe du monde n’est pas un moteur économique pour le Qatar et même s’il perdait l’attribution de l’accueil en 2022, il ne serait pas financièrement inquiété. Il y aurait par contre des effets dans le nouveau pays hôte mais, comme il s’agirait probablement d’un pays riche comme l’Angleterre, l’Allemagne ou l’Italie, l’impact serait très faible sur l’économie globale.
La Russie, qui a accueilli la Coupe du monde en juin et juillet 2018, a vu ses dépenses grimper en flèche. Les documents officiels montrent une dépense 11,8 milliards de dollars afin de financer l’accueil du tournoi. Alors que de nombreux pays considèrent ces dépenses comme un investissement en infrastructure sur des décennies, il est très courant que les stades ne soient plus utilisés une fois le rideau de la compétition baissé. Au Brésil par exemple, le stade Arena Pernambuco, à Recife, peut maintenant être loué pour des anniversaires.
LES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Il y aurait peut-être un peu de fuite des capitaux hors des pays du Golfe pendant quelques mois, mais rien de sérieux.
John Phelan
Économiste, Centre of the American Experiment
Je ne pense pas qu’il y aurait d’effets du tout. Le Qatar utilise le tournoi pour montrer sa richesse, pas pour développer sa croissance, contrairement au Royaume-Uni lors des Jeux Olympiques de 2012.
Les chiffres montrent que les Coupes du monde ont des effets minimes mais intéressants sur les marchés boursiers. En fait, pendant le Mondial de 2010 en Afrique du Sud, le nombre de transactions opérées quand l’équipe nationale jouait chutait de 45% sur 15 marchés boursiers internationaux selon une étude de la BCE (Banque centrale européenne). À chaque fois qu’un but était marqué, une autre chute de 5% s’ajoutait. Le vainqueur de la Coupe du monde a aussi des chances de voir son marché boursier s’afficher en hausse, selon une étude de Goldman Sachs affirmant que les pays vainqueurs précédents ont enregistré un bond de 3,5% de leur indice boursier les mois suivant la victoire.
LES CONSÉQUENCES SOCIALES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Ce serait un choc pour la main-d’œuvre étrangère dans le monde entier et cela encouragerait à mieux traiter la main-d’œuvre itinérante de Corée du Nord et des Philippines. Les ONG utiliseraient cela comme argument dans leur activisme.
Joshua Mahony
Analyste des marchés, IG Market
Le sentiment de persécution des nations du Moyen-Orient par les pouvoirs traditionnels européens et américains grandirait un peu plus.
John Phelan
Je pense que l’on verrait de la colère se propager au Moyen-Orient. Ce serait perçu comme un nouveau tour de force des pays occidentaux. Cela n’aurait pas l’impact qu’a eu la guerre en Irak ou les caricatures de Mahomet, mais il y aurait quand même des effets et cela nourrirait les discours déjà existants.
LES CONSÉQUENCES SOCIALES