LES CONSÉQUENCES POLITIQUES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Si Jeremy Corbyn était élu Premier ministre suite à une élection anticipée, il y aurait une profonde polarisation politique, car Corbyn s’aliénerait des électeurs conservateurs et centristes. On verrait aussi une radicalisation de la droite. Ce serait un désastre car certaines réformes thatchériennes, qui ont permis au Royaume de se remettre en marche, seraient sûrement suspendues. Mais la plus grande question est celle de la politique étrangère. Jeremy Corbyn a créé des liens avec des personnages vraiment dérangeants, que beaucoup en Occident considèrent antisémites, terroristes, etc. Il est mitigé en ce qui concerne les liens que le Royaume-Uni entretient avec l’Europe et les États-Unis. Je me demande s’il pourrait envisager de quitter l’Otan. Le Royaume-Uni se retirerait probablement du Moyen-Orient, ce qui mettrait un terme à la relation spéciale du pays avec les États-Unis.
Ben Page
PDG d’Ipsos MORI
Des politiciens de tout spectre politique clament qu’il faut faire quelque chose concernant les impôts locaux et il se pourrait que Jeremy Corbyn introduise l’impôt sur la fortune. C’est impensable qu’un millionnaire qui possède une maison à 70 millions de livres paie la même chose qu’un propriétaire à Londres dont le bien a pris de la valeur et a atteint le million.
Christopher Beauchamp
Analyste des marchés, IG
Tout dépend le style de gouvernement qu’il choisit, combien de modérés il y aurait, et s’ils modéreraient leurs politiques. En supposant qu’ils arrivent à s’imposer politiquement, vous verriez alors un gouvernement plus à gauche, en contradiction avec l’Otan - et donc en contradiction avec les États-Unis, surtout en ce moment, et même avec le reste de l’Europe. Les critiques de Jeremy Corbyn sur l’Europe portent sur des arguments de gauche, donc cela ne va pas beaucoup rassurer les pro-européens. Le Royaume-Uni réduirait aussi ses dépenses militaires dans le but d’occuper une place moins importante au sein de l’Otan, ou se retirerait complètement de l’organisation militaire, ce qui le conduirait à s’isoler de nombre de ses alliés clés internationaux.
LES CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Il y aurait un ralentissement de l’économie à mesure que les capitaux étrangers se replieraient et que Jeremy Corbyn mettrait en place un programme économique de gauche traditionaliste typique des années 1970. Il y aurait de l’inflation due aux coûts induits par un programme socialiste.
Ben Page
PDG d’Ipsos MORI
Globalement, il y aurait une peur concernant le taux de croissance économique. Honnêtement, peu importe qui remportera la prochaine élection, il faut s’attendre à une hausse des impôts pour financer les services publics. Sur le court terme, cela donnerait un coup de pouce à l’économie du fait des hausses des dépenses dans les services publics mais il y aurait ensuite potentiellement plus d’inflation du fait de l’injection de monnaie et de l’augmentation de la dette publique. On entrerait vraiment dans un territoire inconnu. La politique serait très polarisée, et les principaux médias de masse deviendraient presque hystériques. La grande question serait de savoir comment Corbyn et McDonnell gouverneraient. Cela susciterait l'approbation chez les jeunes, moins chez les générations plus âgées, mais l’évolution au fil du temps serait intéressante.
Christopher Beauchamp
Analyste des marchés, IG
À partir du moment où l’économie ralentit et la croissance est touchée, la confiance diminue, en particulier dans le secteur des services. La finance serait une des cibles premières, du fait de régulations bancaires plus strictes. Il y aurait davantage de suppressions d’emploi, les entreprises seraient de plus en plus nombreuses à se relocaliser à l’étranger et certaines banques s’installeraient ailleurs en Europe, surtout en Irlande ou aux États-Unis. Ce serait le premier maillon d’une longue chaîne de conséquences. Le risque serait que l’augmentation des impôts décourage le développement de la croissance des entreprises et des dépenses en investissement. Ce phénomène, à son tour, conduirait à une baisse des dépenses des consommateurs et aurait un impact sur les revenus, et le cercle vicieux serait enclenché.
LES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES
Robert Kelly
Professeur de sciences politiques et diplomatie à l’Université nationale de Pusan
Il y aurait un effet de repli. Cela aurait pour conséquence la fuite des capitaux et cela empirerait à mesure que Jeremy Corbyn poursuivrait son programme socialiste. Combiné au Brexit, cela pousserait la capitale financière européenne à migrer de la City de Londres à Francfort.
Ben Page
PDG d’Ipsos MORI
On s’attendrait à une chute de la livre sterling. Bien sûr, la chute de la livre est généralement bonne pour la Bourse puisque les entreprises gagnent surtout de l’argent à l’étranger. Cela provoquerait une vague de confiance à court terme sur les marchés, avec une montée ou une baisse des actions des industries en voie de nationalisation, en fonction du mécanisme proposé.
Christopher Beauchamp
Analyste des marchés, IG
Vous verriez beaucoup de capitaux se retirer des obligations d’État du Royaume-Uni, dans l’attente d’emprunts publics élevés, et les gens qui vendraient la livre sterling passeraient à l’euro ou au dollar. Les gens s’attendraient à ce que la croissance britannique se paralyse, la hausse des impôts ajouterait une pression, et une boucle de rétroaction se mettrait en place. Cela aurait un impact sur la livre sterling et des investisseurs se retireraient des actifs britanniques, tout en cherchant à vendre de la livre sterling. Cela continuerait à peser sur la monnaie britannique. Une croissance économique plus faible tendrait à obliger la Banque d'Angleterre à réduire les taux d'intérêt, ou entraînerait un nouvel assouplissement quantitatif, ce qui aurait aussi tendance à être négatif. Vous pouvez donc voir comment tous ces effets ont tendance à se rejoindre et à avoir un impact les uns sur les autres.
LES CONSÉQUENCES SOCIALES
Ben Page
PDG d’Ipsos MORI
Il y aurait bien évidemment une hausse des impôts, mais aussi davantage de dépenses publiques. On peut donc imaginer qu’il effectuerait des coupes budgétaires sur les salaires dans la fonction publique. Il pourrait donc y avoir des effets positifs mais aussi très certainement beaucoup de turbulences.
Christopher Beauchamp
Analyste des marchés, IG
Cela dépendrait des politiques économiques, mais les impôts augmenteraient très certainement. Les ménages aux revenus les plus élevés verraient leurs impôts grimper, ce qui pourrait avoir un impact sur la consommation dans tous les secteurs, notamment les secteurs clés de l’économie. Cela aurait l'avantage à court terme d'augmenter les recettes fiscales, mais ralentirait la croissance économique à long terme. Comme dans les années 1970, le taux d'imposition élevé découragerait l'activité économique et il y aurait un risque, sur le long terme, de répercussions sur l’ensemble de l’économie.
Robert Kelly
L’arrivée d’un marxiste de la vieille école à Downing Street provoquerait une confusion générale dans le pays. Le monde entier se demanderait ce qui est arrivé au Royaume-Uni, après le Brexit et Jeremy Corbyn.
LES CONSÉQUENCES SOCIALES