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La Finance de l’Ombre ou Shadow Banking : explication et fonctionnement

Bien qu’échappant à toute forme de règlementation et considéré à raison ou à tort comme la base de certaines crises financières, le « shadow banking » est un élément indispensable au bon fonctionnement de l’économie mondiale.

Source : Bloomberg

Ce concept vit jour aux Etats-Unis vers les années 70 avec l’avènement des fonds monétaires. Il s’est ensuite développé avec la libéralisation des marchés financiers dans les années 80.

Qu’est-ce qu’est donc le « shadow banking » ? comment fonctionne-t-il ? et représente-t-il un danger pour le système bancaire traditionnel ?

Qu’est-ce qu’est le « shadow banking » ou « la finance de l'ombre » ?

Le shadow banking ou littéralement « finance de l’ombre » en français fait référence à toutes les opérations financières qui se font hors du cadre des activités bancaires régulées. Ce terme apparut lors de la crise financière de 2007-2009 renvoi aussi aux différents intermédiaires financiers participant au financement de l'économie mondiale en dehors du circuit bancaire traditionnel. Le « shadow banking » ne fait pas allusion aux activités illégales, raison pour laquelle certains trouvent l’expression « banque parallèle » comme plus appropriée.

Pour une bonne compréhension du shadow banking, il est nécessaire d’avoir une certaine maitrise de l’activité bancaire traditionnelle. En résumé, une banque fait ce que nous appelons de l’intermédiation financière qui consiste à transformer ses sources de financement (son passif) en actifs. Cette transformation porte sur des critères comme la maturité avec l’utilisation d’un effet de levier permettant l’accroissement de la rentabilité de ses capitaux propres en recourant à l'endettement. Elle se fait aussi au moyen de la liquidité par le financement des actifs illiquides ; et enfin par le risque que la banque assume à la place de ses déposants et de ses créanciers. Considérant son rôle comme essentiel dans le financement de l’économie, le secteur bancaire est très régulé et bénéficie aussi de certaines garanties qui sont définies par le comité de Bâle.

Quelles sont les activités liées au « shadow banking » ?

La finance de l’ombre couvre un certain nombre d’activités opérés par des acteurs comme les banques d'affaires, les hedge funds, les fonds de titrisation, les fonds monétaires, les fonds de pension, les fonds négociés en bourse ainsi que les entreprises de capital-investissement et les plateformes de monnaies virtuelles comme le bitcoin.

Les fonds de titrisation

Le fonds commun de titrisation est une entité sans personnalité morale qui s’apparente à une copropriété faisant des opérations de titrisation. La titrisation est une technique financière visant à transférer des actifs financiers aux investisseurs en les transformant en des titres financiers émis sur le marché des capitaux à travers une société ad hoc.

Cette technique peut aussi viser le transfert du risque financier de certains actifs aux investisseurs. Venue des États-Unis vers les années 1960, la titrisation s’est vite répandue en Europe à partir des années 2000. Elle a été introduite en France par la loi du 23 décembre 1988 dans le but de faciliter le développement du crédit immobilier.

Les hedge funds

S’il n’existe aucune définition légale pour les hedge funds ou fonds alternatifs, ils sont décrits comme des fonds d’investissements spéculatifs non cotés ayant pour objet de générer une performance absolue. Pour ce faire, ils utilisent les mêmes actifs que ceux qui sont utilisés par les gérants traditionnels mais avec une stratégie plus agressive et plus risquée. Parmi les principales caractéristiques des hedge funds vous trouverez :

  • des investissements assez élevés,

  • des investissements très libres et pas toujours règlementés,

  • l’utilisation de l’effet levier sur les fonds alternatifs pour doper les profits au maximum.

Les hedge funds visent des rentabilités élevées en utilisant des produits dérivés comme les options. Ils recourent aussi beaucoup à l'effet de levier permettant d’accroitre la rentabilité des capitaux propres investis lorsque le marché est porteur ; et expose à des risques considérables lorsque les cours du marché baissent. Les gestionnaires des hedge funds utilisent des stratégies variées suivant les instruments utilisés et les approches d’investissement telles que les stratégies directionnelles, les stratégies dites “distressed securities” et les stratégies liées aux produits dérivés.

Les fonds monétaires

Les fonds monétaires ou organisme de placement commun en valeurs mobilières (OPCVM) sont des outils d’investissement des valeurs à court terme dans le marché monétaire. Si les fonds monétaires sont vus comme des fonds sans risque, notons qu’ils représentent tout de même un risque très minime et offrent des rendements se rapprochant des produits de classement classiques comme les comptes d’épargne des banques.

Les fonds monétaires sont gérés par des sociétés de gestion telles que la filiale d’une banque, une compagnie d’assurance ou une société indépendante qui en déterminent le rendement suivant la qualité de gestion. Ils sont généralement une partie utile incluse dans un portefeuille d’investissement diversifié comprenant des placements à long terme.

Les fonds monétaires peuvent être divisés en deux groupes : d’une part il y a les fonds monétaires réguliers qui misent sur la sécurité et la visibilité en investissant dans des titres avec échéance proche. L’avantage de ces fonds est que le rendement est connu d’avance et la performance est régulière. De l’autre côté, nous trouvons les fonds monétaires dynamiques qui offrent aux gérants des durées d’investissements plus longues (d’une durée supérieure à trois mois). Ces fonds ont pour rôle de battre l’indice de référence en spéculant sur l’évolution des taux directeurs. L’avantage de ce type d’investissement est que le capital est préservé parce que le risque en capital est faible.

Les fonds obligataires

Les fonds obligataires sont investis principalement sur des obligations ; qui sont en fait des titres de créance émis par des sociétés, par un Etat ou par une collectivité locale. L'investissement dans des fonds obligataires présente aussi des risques parce qu’ils sont soumis aux aléas du marché. Ainsi lorsque le taux d’intérêt baisse, la valeur des cours des obligations grimpe et lorsque le taux d’intérêt monte, la valeur des obligations baisse. En achetant des parts dans un fond obligataire, vous recevez des droits sur les obligations et les autres titres qui composent le portefeuille du fonds.

Il existe différents types de fonds obligataires :

  • les OPCVM qui sont investis en obligations d’Etat et qui n’intègrent que la dette publique (française ou étrangère) dans leur portefeuille.

  • les fonds investis en obligations d’entreprises privées qui offrent des rendements très satisfaisants.

  • les fonds obligataires investis en obligations convertibles qui permettent de profiter de la sécurité de l’obligation en jouant sur un rebond du marché.

Quel est le poids de la finance de l’ombre en France et dans le monde ?

S’il est difficile de mesurer avec précision le poids exact du « shadow banking », le Financial Stability Board (FSB) créé en 2010 par le G20 avait estimé le marché à 92.000 milliards de dollars en 2017. Ce qui représentait près de 30.000 milliards de plus qu’en 2007, avant la crise des subprimes. Le FSB estime que les actifs détenus par le shadow banking représentent le quart des actifs financiers mondiaux avec les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la zone euro détenant la majorité des actifs. D’autres puissances économiques émergentes telles que la Russie, la Chine et l’Inde voient aussi la « finance de l’ombre » progresser fortement.

Source : Bloomberg

Quels sont les risques de la finance de l’ombre sur l’économie ?

La finance de l’ombre présente deux risques majeurs sur l’économie mondiale : - son poids dans le système financier global et - l’interdépendance des acteurs de la finance de l’ombre entre eux et avec le système bancaire traditionnel international. Le "shadow banking", les banques et les investisseurs institutionnels ont créé un réseau d’interdépendance et des relations difficiles à évaluer. Le régulateur éprouve beaucoup de difficulté à appréhender le volume et les stratégies du « shadow banking » parce qu’il implique des entités et des activités peu régulées, bien que tout à fait légal.

La finance de l’ombre présente aussi un important risque systémique à cause de l’opacité, des effets procycliques et des risques de panique pouvant se propager jusqu’ au système bancaire « normal » comme ce fut le cas avec la crise des subprimes en 2007.

Le Shadow Banking : prémisses d’une régulation de la finance parallèle

Pour étudier le « shadow banking » et y mettre davantage de transparence et de régulation, le G20 a instauré le Financial Stability Board (FSB) qui a formuler un certain nombre de mesures pour sécuriser ce secteur. Parmi ces mesures mentionnons des nouvelles règles pour limiter la probabilité des liquidations massives sur les fonds monétaires, la mise en place des seuils de remboursement en cas de crise, ainsi que l’encadrement des activités de titrisation avec l’obligation faite aux banques de garder dans leur bilan une partie des titres émis.

La régulation du comité de Bâle vise à garantir un niveau minimum de capitaux propres pour assurer la solidité financière des banques. Ce comité a fixé une exigence en capital supplémentaire pour les expositions des banques aux "entités non régulées" dans le but de prévenir le risque systémique.

En France, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) établi par la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 dresse régulièrement un état des lieux sur le finance de l’ombre dans le pays.


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