Théorie de la finance comportementale : émergence d’un paradigme consacré par le prix Nobel d’économie
La théorie de la finance comportementale est un champ d’études relativement récent qui se penche sur la psychologie du trader et les différents sentiments qui influencent ses décisions d’investissement.
Si selon la théorie de la finance classique les hommes sont les plus souvent rationnels et logiques dans la maximisation de leur richesse, les universitaires en finance et en économie ont fini par trouver que certains facteurs comme les émotions et la psychologie interviennent dans nos prises de décisions. Des anomalies qui rendent ces dernières imprévisibles ou irrationnelles, et qui ne trouvent pas d’explications dans la théorie classique.
Découvrons les principaux enseignements tirés de la théorie de la finance comportementale, ses rapports avec la finance conventionnelle et comment éviter ses pièges.
La théorie de la finance comportementale : à quoi sert-elle et comment la comprendre ?
La finance comportementale combine les théories psychologiques comportementales et cognitives avec l'économie conventionnelle et la finance pour comprendre les facteurs qui influencent la prise de décisions irrationnelles de certains investisseurs.
Cette théorie née il y a une trentaine d'années et reconnue officiellement en 2002 tend à démontrer que les investisseurs ne sont pas toujours rationnels. Leurs décisions sont influencées par des erreurs de jugements systématiques (biais cognitifs), ou par des facteurs émotionnels tels que la peur ou un excès de confiance.
La théorie de la finance comportementale explique que les comportements des investisseurs se rejoignent par un effet de mimétisme qui a une influence importante sur le développement des marchés, en opposition à la « théorie de l'efficience des marchés ». En clair, elle récense les comportements humains anormaux et leurs effets sur l’évolution des marchés pour les utiliser dans les stratégies d'investissement.
La finance comportementale ou la remise en cause de la théorie de l’efficience des marchés
La finance comportementale s’oppose à la théorie de l'efficience des marchés (HEM) qui stipule que les investisseurs sont parfaitement rationnels dans l’analyse des informations reçues pour maximiser leur richesse et augmenter leur bien-être. Selon cette théorie conventionnelle développée dans les années 50 et 60, les facteurs externes et les émotions ne peuvent pas influencer les individus lors des choix économiques.
Parmi les postulats de la théorie de l'efficience des marchés, mentionnons le fait que :
les investisseurs disposent toujours des informations complètes et précises,
les investisseurs ont une tolérance raisonnable face au risque qui ne change pas,
les investisseurs visent toujours à gagner le plus d’argent en cherchant le meilleur prix, et
les investisseurs prennent toujours des décisions rationnelles.
Il a cependant été prouvé que dans la plupart des cas, le comportement des individus est souvent irrationnel dans la vie réelle, contrairement à cette hypothèse.
Les faits constatés à la bourse par exemple ont largement contribué à contredire cette théorie. Si les investisseurs se comportaient de manière rationnelle, comment expliquer le fait que les actions ou le forex affichent des rendements plus élevés les derniers et les premiers jours du mois ? Ou encore pourquoi les actions présentent-elles des rendements inferieurs les lundis ?
Il n’existe aucune explication rationnelle à ces faits ou encore au fait que plusieurs titres offrent une surperformance au mois de janvier. Ce sont tout simplement des faits liés au comportement humain. Il y a des études qui démontrent que les actions bondissent au mois de janvier simplement parce que les investisseurs les vendent à la fin de l’année pour des raisons fiscales.
Ainsi les krachs boursiers, les bulles spéculatives et autres anomalies constatées dans le passé ont incité les universitaires à remettre en cause la théorie de l'efficience des marchés. Ils se tournèrent vers la psychologie cognitive pour trouver une explication aux comportements irrationnels et illogiques qui ne trouvaient pas d’explications dans la finance moderne. Ils s’accordèrent sur l’existence de plusieurs degrés d'efficience (forte, semi-forte et faible). Si la finance comportementale trouve des explications à nos actions, la finance moderne cependant apporte des explications sur les actions de l'homme économique (L'homo economicus).
Les facteurs d’influence en matière de finance comportementale
Il y a essentiellement deux facteurs d’influence :
Facteurs d'influence externes en finance comportementale
Parmi les facteurs d’influence externes mentionnons :
la météo
Une étude menée par E.M. SAUNDERS jr avait démontré que le taux d’ensoleillement avait un impact sur les marchés financiers. Les journées très ensoleillées avaient un impact positif sur le marché alors que les journées très nuageuses avaient un impact négatif.
le weekend
L’étude de K.R. FRENCH réalisé en 1980 compare les écarts constatés entre le vendredi soir et le lundi matin et ceux constatés les autres jours de la semaine. D’après elle, l’humeur des investisseurs influence leurs décisions. Ainsi avant de partir en weekend, ils seront de bonne humeur et auront tendance à faire d’avantage d’achat. Le lundi en revanche est connu comme une journée baissière à cause du pessimisme des investisseurs.
la sociabilité
Une étude menée par H. HONG, J.D. KUBIK et J.C. STEIN démontre une corrélation entre la sociabilité d’un individu et sa propension à faire des investissements. Plus un individu est sociable, plus il est ouvert à investir et a moins peur du risque. Alors qu’un individu moins sociable est plus anxieux et a peur de l’inconnu.
l'ancrage mentale
Les investisseurs ont souvent du mal à remettre leur première impression en cause. Ainsi lorsqu’ils pensent que le marché est baissier, il leur faut beaucoup de temps avant de se raviser même lorsque la tendance change.
le mimétisme
Souvent les investisseurs réagissent par mimétisme. Ce fait donne plus de force aux tendances et accentue les mouvements des marchés boursiers à la hausse ou à la baisse.
la confirmation
L’instant où d'un point haut ou bas du marché, l’investisseur se sent en confiance et ne veut pas remettre son investissement en cause.
l’engrenage
Les investisseurs refusent de couper leurs positions et accepter leurs pertes se disant que le marché finira par se retourner.
Les anomalies du marché
Ces anomalies sont souvent à la base d’importants mouvements de marché qui ne sont pas toujours considérés dans la théorie financière classique. Parmi les anomalies de marché les plus connues, mentionnons des facteurs directement liés à l'acquisition de la connaissance.
Nous pouvons mentionner des éléments comme les anomalies calendaires ou encore météorologiques. Il y a aussi les sous-réactions, les surréactions et une forte volatilité des marchés provenant d’une information ou d’un indicateur. Enfin il y a aussi le phénomène lié au mimétisme.
Comment éviter les pièges de la finance comportementale ?
Les pièges de la finance comportementale
Les professionnels de la finance comportementale identifient 5 grands pièges à éviter :
l’excès de confiance
C’est un piège courant chez les investisseurs qui pensent avoir une meilleure maitrise dans leurs investissements comparés aux autres. Cet excès de confiance est souvent à la base d’une hyperactivité qui pousse à faire des ordres plus fréquents causant un cout élevé en termes de frais de transactions.
Une mémoire sélective
Les investisseurs préfèrent très vite oublier les opportunités d’achat manquées et les grosses pertes qu’ils ont subies. Un bon investisseur doit rester lucide sur les raisons aussi bien des pertes que des bons investissements réalisés.
le biais de confirmation
Un mécanisme psychologique qui pousse les investisseurs à accorder plus d’importance aux avis qui vont dans le sens de leur expérience et de leur choix, plutôt que de considérer les avis contraires qui peuvent leur faire regretter leur choix. Un investisseur équilibré se doit de prêter attention à tous les avis et surtout ceux qui diffèrent de leur position.
le biais de familiarité
Ce facteur pousse certains investisseurs à préférer un biais national ou un biais de sous-diversification. C’est ainsi que par exemple, un investisseur américain préférera investir dans les sociétés américaines, bien qu’il y ait des entreprises étrangères offrant des meilleurs rendements dans le même secteur. De même pour un investisseur français qui optera pour les entreprises du CAC40, se disant mieux comprendre ce qui se passe sur les valeurs françaises.
Sur la sous-diversification, les investisseurs préfèrent détenir une quantité restreinte de valeurs dans un seul portefeuille, bien que sachant qu’une diversification aiderait à réduire les risques.
l’effet de position
Cet élément prend en compte l’aversion qu’éprouve les investisseurs à l’idée de réaliser des pertes. Ainsi Ils cherchent toujours à prendre leurs bénéfices sur les positions gagnantes en vendant les titres qui rapportent, et hésitent à se débarrasser des titres qui connaissent des pertes dans l’idée de se refaire très vite.
Comment éviter ces pièges en tant qu’investisseurs ?
Généralement les investisseurs disposent de deux solutions pour éviter de tomber dans les pièges de la finance comportementale :
Garder la tête froide et considérer des données factuelles
L’investisseur qui est au courant de ces différents facteurs peut être en mesure de les identifier dans le processus de sa prise de décision. Il peut aussi apprendre de ses erreurs en analysant tous les biais humains, et en déterminant dans quelle mesure ces derniers ont pesé dans ses décisions passées.
Voici quelques questions qui peuvent être utiles dans cet exercice : « Est-ce que je pense toujours que j’ai raison ? » « Est-ce que je prends des risques non calculés dans mes investissements et place la responsabilité de mes pertes sur des facteurs externes ? » « Ai-je déjà acheté une action en me basant simplement sur un bon pressentiment sans prendre le temps d’analyser d’autres facteurs ? ».
recourir à des professionnels de l’investissement
Une autre manière d’éviter les pièges de la finance comportementale serait de recourir à l’expérience des professionnels dans le secteur de l’investissement, à l’exemple des OPCVM. Des études ont démontré que certains facteurs humains comme l’effet de disposition lié aux pertes étaient plus réduits chez les investisseurs professionnels, de l’ordre de 35% seulement contre 70% chez les investisseurs particuliers.
L’utilisation d’un « robo-advisor » ou robot-conseiller composé d’un ensemble d’algorithmes mathématiques qui prend les décisions d’investissement optimales et rationnelles à votre place est un autre moyen de réduire considérablement les interférences.
De nos jours, la finance comportementale est très utilisée par différents fonds d'investissements lors des crises financières, et les périodes à forte volatilité pour mieux comprendre les placements et réaliser des bons rendements.
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