Marché obligataire : le spread Italie-Allemagne se creuse dans la perspective d’un regain de tensions entre Rome et Bruxelles

Le taux d’emprunt à 10 ans de l’Italie a bondi ce début de semaine après l’éclatante victoire de Matteo Salvini aux élections européennes et la perspective de nouvelles tensions entre Rome et Bruxelles.

Ce taux est passé de 2,547 % le vendredi 24 mai, en amont du scrutin européen, à 2,729 % ce mardi midi. En parallèle, le taux dix ans allemand a décroché, passant de -0,104 % à -0,154 % sur la même période, creusant davantage le spread entre les deux obligations d’Etat.

Les investisseurs ont accueilli froidement deux nouvelles du côté de la Botte. La première est relative aux résultats du scrutin européen dont les premières estimations été dévoilées dimanche soir, et le score définitif établi hier.

Elections européennes : La Ligue confortée au détriment de la coalition gouvernementale

La Ligue de Matteo Salvini, membre de la coalition gouvernementale, a largement conforté la vague populiste italienne, en remportant plus de 34 % des suffrages, tandis que son allié, le Mouvement 5 étoiles, en troisième position, enregistre une contre-performance avec un peu plus de 17 % du scrutin, derrière le Parti démocrate qui a obtenu 22,73 % des votes.

Des résultats que les marchés ont interprétés comme générateurs d’une montée de l’instabilité politique en Italie, alors que la coalition n’a cessé de se déchirer ces dernières semaines, même si le ministre de l’Intérieur vainqueur du scrutin a assuré qu’il ne profiterait pas de ces résultats pour imposer de nouvelles têtes issues de son rang au sein du gouvernement.

Mais il semble évident qu’avec de telles coudées franches, La Ligue entend profiter de sa confortable onction populaire. Quant aux Démocrates, arrivés en bonne position, ils devraient également tenter de mieux faire porter leur voix. Dans ce contexte, la perspective de chamboulements politiques – voire la tenue d’élections générales anticipées – sont dans les esprits pour les semaines à venir.

3 milliards d’euros d’amende de Bruxelles ?

Deuxième grande inquiétude du marché, la question des finances italiennes et de son bras de fer avec Bruxelles est revenue sur le tapis cette semaine. Matteo Salvini a annoncé mardi que la Commission européenne pourrait imposer une amende de 3 milliards d’euros à l’Italie pour non-respect des règles communautaires en matière d’endettement et de déficit budgétaire structurel.

D’après des sources de l’agence Reuters, l’exécutif européen devrait lancer le 5 juin des mesures disciplinaires contre l’Italie. Ces décisions pourraient encore peser sur les marchés, d’autant plus si elles tombent la semaine prochaine, avec la réunion de politique monétaire de la BCE, qui se tiendra jeudi 6 juin.

Le vice-président du Conseil italien a promis qu’il « utilisera toute son énergie pour lutter contre des règles budgétaires européennes « dépassées » ». « Nous verrons si nous recevons cette lettre dans laquelle ils nous imposent une amende pour accumulation de dette dans le passé et nous disent de payer trois milliards d’euros », a-t-il par ailleurs déclaré sur RTL.

En 2018, la dette de l’Italie a dépassé 130% du PIB et son déficit a atteint 1,8%. Ce regain de tensions avec Bruxelles et d’incertitudes politiques a entraîné la bourse de Milan dans le rouge aujourd’hui. Il a également pesé sur le Stoxx 600 des valeurs bancaires, où six établissements financiers italiens figurent parmi les plus fortes baisses.