Total « risk-off » sur les marchés : Wall Street continue de dévisser

Update - 15h45

La déconfiture semble continuer pour les marchés actions aux Etats-Unis. Après cinq séances dans le rouge, Wall Street débute une nouvelle journée en repli. Vers 15h45, le Dow Jones est en repli de 1,64% à 26 514 points, le S&P 500 de 1,96% à 3055 points et le Nasdaq Composite de plus de 2,3% à 8772 points.

Première depuis le mois d’août 2019, le Dow Jones et le S&P 500 ont connu mercredi leur cinquième séance consécutive de baisse, terminant respectivement en baisse de 0,46% à 26 957,59 points, et de 0,38% à 3116,39 points. En deux séances, le S&P500 a cédé 6,3%, soit sa plus importante perte en 48h depuis août 2015. Le Nasdaq a réussi à se passer de ce record, en se redressant de 0,17% à 8980,77.

L'Italie et l'Iran en ligne de mire

La propagation du coronavirus hors des frontières chinoises a pris de l’ampleur ces dernières 48h, le Covid-19 ayant été répertorié dans plus d’une cinquantaine de pays, touchant à ce stade plus de 82 000 personnes dans le monde, dont quelque 2800 morts. En Chine, le nombre de nouveaux cas quotidiens est ainsi tombé à un niveau inférieur à ceux détectés ailleurs dans le monde, avec 433 personnes contaminées ces dernières 24h.

Et si l’Empire du Milieu reste de loin le foyer le plus important de l’épidémie, trois autres pays sont particulièrement sous surveillance : l’Italie, qui compte 374 personnes malades et 12 décès, l’Iran avec 245 citoyens touchés et 26 morts, ainsi que la Corée du Sud avec 1766 cas et 13 décès.

En France, dont le bilan est de 18 personnes malades et deux dècès, la situation sanitaire est aussi surveillée de très près après le décès d’une deuxième personne sur le territoire, un résident de l’Oise qui n’était a priori pas entré en contact avec des personnes s’étant déplacées dans des zones à risque.

Enfin, aux Etats-Unis, l’infection d’une personne en Californie qui n’a également pas voyagé dans un foyer de l’infection renforce également les inquiétudes malgré les propos rassurants de Donald Trump hier soir, qui a assuré que le risque d'une telle propagation demeuraient "faibles".

L’accélération de l’épidémie à l’international – qui pèse déjà depuis le début du mois sur les secteurs du luxe, de la tech, des spiritueux et de l’aérien – a accru les annulations de vols et de séjours de la part des consommateurs américains et européens, à une ampleur qui devrait largement peser sur l’économie du tourisme et des tours opérateurs. Après l'annulation du Carnaval de Venise, et du Mobile World Congress, le maintien du Salon de l'Automobile à Genève le mois prochain, et même les Jeux Olympiques de Tokyo, posent désormais question.

Si dans l’Empire du Milieu, l’activité reprend progressivement (d’après le ministère du Commerce, un tiers des PME ont retrouvé leur rythme de production initial), celle-ci est loin d’avoir retrouvé son rythme de croisière et les conséquences sur les chaînes d’approvisionnement continuent de se faire sentir.

Avertissement sur résultats pour Microsoft

Ces derniers jours, un ensemble d’entreprises ont déjà chiffré des prévisions de pertes au premier trimestre, comme Danone qui anticipe un impact négatif de 100 millions d’euros ou Microsoft, qui a prévenu hier soir que ses objectifs initiaux de chiffre d’affaires ne seraient peut-être pas atteints.

De plus en plus de sociétés implantées en Europe ont renforcé ou adopté par ailleurs des mesures préventives supplémentaires, telles que Nestlé et L’Oréal, qui viennent de décider d’interrompre temporairement les déplacements professionnels de leurs collaborateurs.

Les bureaux d’analyses et économistes ont dans ce contexte déjà largement révisé à la baisse leurs projections de croissance des PIB chinois et mondial, ainsi que de la demande de pétrole pour 2020.

Goldman Sachs, qui anticipe un rebond de la croissance américaine au 2^e semestre, estime désormais qu’une « pandémie plus sévère pourrait mener à une perturbation [de l’activité économique] plus prolongée et à une récession aux Etats-Unis ». Ce scénario de récession pourrait entraîner les bénéfices par action des sociétés du S&P 500 à chuter de 13% en moyenne en 2020 avant de rebondir de 10% en 2021.

Chute des rendements obligataires américains

L’ensemble du tableau a largement renforcé l’aversion au risque des marchés financiers cette semaine, où l’on observe un mouvement relativement « brusque » de comportement « risk-off » : les marchés actions mondiaux se replient très fortement : en Europe et aux Etats-Unis, les indices sont entrés en phase de correction depuis leur pic annuel atteint en janvier.

Les rendements des obligations d’Etat sont également en chute libre : la référence américaine, le T-Bond 10 ans, vient de toucher son plus bas historique à 1,27%. Le pétrole compte désormais plus de 20% de baisse depuis le début de l’année, tandis que les valeurs refuges, comme l’or et le yen, retrouvent des couleurs : l’once d’or est reparti cet après-midi au-dessus des 1650$, tandis que la monnaie japonaise s’est appréciée de 2% en cinq séances, s’échangeant à 109,85 aujourd’hui.

Enfin, les spéculations des marchés sur une prochaine baisse des taux de la Fed se sont particulièrement renforcées. D'après le baromètre de référence CME FedWatch, les probabilités d'un tel scénario à l'issue de la réunion du FOMC du 18 mars ont bondi à 67,5% alors qu'elles ne dépassaient pas 9% il y a encore une semaine. Elles sont de 94,8% pour la réunion suivante du 29 avril.

Publiées avant l’ouverture, les commandes de biens durables aux Etats-Unis sont ressorties supérieures aux attentes, en baisse de 0,2%, mais sur une période antérieure à la propagation du Covid-19, au mois de janvier. Hors défense et aéronautiques, elles ont même progressé de 1,1% alors que le consensus anticipait une quasi-stabilité.

Les dernières estimations de PIB du 4^e trimestre aux Etats-Unis sont confirmées à 2,1%. Enfin, le nombre d’inscriptions hebdomadaires au chômage a augmenté à 219K, à leur plus haut niveau depuis la première semaine de janvier.